Eubée - Grèce centrale, Grèce antique - Εὔϐοια

Flag Eubée - Grèce centrale

L'Eubée (Εὔϐοια / Euboia) est en superficie la deuxième des îles grecques après la Crète. Elle est située en mer Égée, en face de l'Attique et de la Béotie. La cité principale est Chalcis. À l'époque archaïque, l'Eubée est confrontée à l'une des premières guerres de la Grèce antique documentée : la guerre lélantine (710 à ) entre Chalcis et Érétrie.

L'Eubée - Grèce centrale est une des 60 régions1 qui dépendent de la Grèce antique Flag Grèce antique

Eubée - Grèce centrale : descriptif

Avec l’île de Skyros, ainsi qu'une partie continentale (Anthidona et Avlida), l'île forme le district régional d'Eubée de la périphérie de Grèce-Centrale.

Noms

Le nom d’Eubée date de l’Antiquité et son étymologie renvoie à εὖ : « bon », et βοῦς : « bétail ». L’île a aussi été appelée Ellopie (d'après Ellops fils d'Ion), Aonie (d'après les Aones), Abantis (d'après les Abantes). Elle a par ailleurs souvent été appelée du nom de sa ville principale, Chalcis, et inversement. À partir du Moyen Âge, le nom couramment utilisé pour la ville et l'île est Égripos (et ses variantes), dérivé du nom du canal de l'Euripe, donnant par déformation le nom latin de Négrepont (et ses variantes). Depuis l'indépendance, le nom Eubée (Evvia) est le seul utilisé.

Mythologie

Un certain nombre de mythes eubéens sont liés à l'activité volcanique présente sur l'île. Ils évoquent surtout les Titans et les Géants. Ils s'inscrivent d'abord dans le cadre de la Titanomachie, principalement dans l'affrontement entre les Titans et les Hécatonchires. Un des Hécatonchires vainqueurs, Briarée, était honoré à Carystos sous ce nom et à Chalcis en tant que Œgéon. Il habiterait sous l'île qui le sentirait encore s'agiter. Le Géant Tityos séjournerait aussi dans l'île, où Rhadamanthe serait venu lui rendre visite. Son antre, appelé Élarium, était montré aux visiteurs. Selon certaines versions, Orion aurait été élevé sur l'île.

Une autre série de mythes est liée à Zeus et à ses amours. Lors du mariage sacré de Zeus et Héra, les Curètes vinrent en Eubée dont Zeus leur confia la garde. Io fut aussi dissimulée sur l'île et y enfanta. Surveillée par Argos pour le compte d'Héra, elle fut délivrée par Hermès qui tua le gardien dans un lieu qui prit le nom d'Argoura. Le culte de Dionysos fut apporté sur l'île par les Thébaines. Le roi de l'île, Aristée, confia l'enfant à sa fille la nymphe Macris qu'Héra poursuivit ensuite de son courroux et chassa d'Eubée. Ces mythes pourraient être des souvenirs du passé archaïque de l'île. Aristée fils d'Apollon, autre divinité importante de l'île, passait pour avoir enseigné aux hommes l'art d'élever des troupeaux, d'élever des abeilles et de faire de l'huile d'olive. La richesse agricole de l'île dans l'Antiquité pourrait avoir inspiré ces légendes, Dionysos ajoutant la viticulture. Quant aux Curètes, ils pourraient faire référence au fait que l'Eubée fut, un temps, soumise à la domination crétoise.

Selon Homère, les habitants de l'Eubée auraient été appelés Abantes (Ἄϐαντες). Ils sont décrits comme « respirant la fureur », « impétueux, à cheveux longs sur la nuque, guerriers ardents ». Ils sont menés, lors de la guerre de Troie, par Éléphénor, qui apporte quarante nefs à la coalition grecque. Les historiens ignorent si ce nom dérive de la ville phocidienne d'Abaé, ou d'Abas, le héros argien. On peut parfois aussi retrouver le nom de la region comme Abantide ou en grec Abantis, lorsqu'elle était habitée par les Abantes après l'invasion thessalienne.

Dans Salammbô, Flaubert mentionne les « trois mille deux cents talents euboïques exigés par Lutatius » de Carthage lors des guerres puniques.

Archiloque se posant en « serviteur du dieu de la guerre », regrette la manière « homérique » de combattre des Abantes d'Eubée, au corps à corps, honorable mais moins efficace que celle des Thraces, qui, avec leurs flèches et frondes, inquiétaient beaucoup les colons de l'île Thasos.

« On luttait corps à corps avec la lance et l'épée, et non avec des flèches et des frondes, »

Histoire

Préhistoire

L'Eubée compte des villages dès le néolithique comme en témoignent les sites archéologiques du centre et à l'ouest de l'île remontant au IIIe millénaire av. J.-C.. Une activité commerciale avec les Cyclades est attestée alors. La période de l'âge du bronze ancien en Eubée, est représentée par la découverte d'un site urbain très important à Manika (près de Chalcis). L'étude d'une nécropole permet d'affirmer que l'alimentation des hommes de cette époque comportait une consommation régulière de légumes et de viande. Cette découverte vient rejoindre quelques rares spécimens déjà trouvés sur sol eubéen à Magoula près d'Érétrie et à Styra, qui confirment, avec d'autres trouvailles, des liens étroits qu'entretenaient l'Eubée et l'Érétrie avec les Cyclades au Cycladique Ancien II (environ 2500 av. J.-C.).

Antiquité

Période mycénienne

Au IIe millénaire av. J.-C. la présence mycénienne est archéologiquement attestée sur l'île.

Âges obscurs

  • Les périodes post-palatiale et submycénienne vont de 1200 à 1050 av. J.-C. Elles ont laissé peu de vestiges.
  • La période protogéométrique va de 1050 à 900 av. J.-C. La nécropole de Toumba à Lefkandi où le tombeau d'un noble (sûrement un roi) a été mis au jour date du début du xe siècle av. J.-C.
  • La période géométrique (vers 900-700 av. J.-C.), est marquée par une migration eubéenne en Italie et en Chalcidique.
  • La période Géométrique Moyen II (vers 775-770 av. J.-C.), est marquée par une colonisation eubéenne vers Pithécusses (actuelle Ischia), île italienne située en mer Tyrrhénienne, au nord du golfe de Naples, dans le groupe des îles Phlégréennes. Cumes, qui est la première colonie de Grande Grèce, est fondée par des colons de Chalcis vers 740 av. J.-C.

Période archaïque

La richesse minière et agricole de l'Eubée a attiré de nombreux belligérants, d'autant que sa position stratégique permet de contrôler la région. En étroites relations avec les habitants de l'Attique, les insulaires sont, à la période archaïque, des Lélèges, des Courètes venant d'Étolie, et quelques Phéniciens ; les cités de Chalcis et d'Érétrie participèrent à la colonisation grecque. Selon Homère, les habitants du Nord de l'île étaient des Histéens, plus au sud des Ellopiens, le centre étant habité par des Ioniens venus de l'Attique : c'est sur cette partie centrale de l'Eubée, habitée auparavant par les Abantes ou les Curètes, que les Athéniens établissent les colonies d'Érétrie et de Chalcis. Enfin au Sud de l'île vivaient les Driopes.

Selon les récits légendaires, les Curètes auraient été les premiers à se protéger par une armure de bronze lors des combats. Une ville nommée Histiée et son district Histiœotide situés au nord de l'île ont été, selon Strabon, donnés également à une ville du nord de la Thessalie par des colons histiéens émigrés, chassés par les Perrhœbes.

Colonies athéniennes

Selon Strabon et Conon, les premières colonies athéniennes, sur l'île d'Eubée, se forment avant l'arrivée de Xouthos. Les fils d'Érechthée, rejetés par le pouvoir, cherchent refuge sur l'île d'Eubée. Thespios un de ses fils fonde Thespies, selon Pausanias. Eustathe, affirme que cette ville est fondée par Thespios fils de Teuthras et petit-fils de Pandion. Ellops, fils d'Ion (selon la mythologie), entraîne une forte migration athénienne et fonde la ville d'Ellopia, sur la province appartenant aux Histiéens. Homère indique que ces colons se sont établis sur Histiée, à Corinthe, à Édepse et à Oropiœ,.

Selon Scymnos de Chio, Pandoros aurait fondé Chalcis et Érétrie. Après les guerres médiques, l'Eubée est totalement soumise aux Athéniens, tandis que les colonies de Cumes en Grande Grèce et Naxos en Sicile, sont affiliées à Chalcis. La ville de Chalcis est si puissante qu'elle multiplie les colonies jusqu'en Macédoine.

Les Eubéens subissent de nombreuses guerres, en particulier contre les Athéniens, les Perses, et les Spartiates. Ils sont tantôt asservis, tantôt libérés. Dans l'Antiquité l'histoire de l'île se confond avec celles de ses villes principales Chalcis et Érétrie :

  • Vers 700 av. J.-C. : Chalcis colonise la Chalcidique, constituée des trois presqu’îles de Athos, Cassandra et Sithonia. Chalcis défait sa rivale Érétrie lors de la guerre lélantine, et à la suite de cette victoire domine toute l’Eubée.
  • Vers 506 av. J.-C. : à la suite de la défaite de la coalition des Béotiens et Chalcidiens, Athènes va implanter plusieurs milliers de colons en Chalcidique, et colonise l’Eubée affaiblie par la guerre interne entre Chalcis et Érétrie.
  • Vers 490 av. J.-C. : début des guerres médiques entre Grecs et Perses qui se terminent vers 449 av. J.-C. Datis, chef de la flotte perse s’empare de Carystos et pille la ville. Érétrie, menacée à son tour, demande l’aide d’Athènes qui envoie 4000 colons athéniens de Chalcis. Les Erétriens, divisés, capitulent après six jours de siège. La ville est pillée et sa population déportée en captivité.
  • Vers 480 av. J.-C. : deuxième guerre médique entre les Grecs et les Perses. Bataille navale du cap Artémision, situé au nord de l’île d’Eubée, la flotte grecque commandée par Eurybiade de Sparte tient tête trois jours à la flotte perse, et se replie à Salamine à l’annonce de la mort de Léonidas.
  • Vers 340 av. J.-C. : Philistidès, soutenu par Philippe II de Macédoine, opprime cruellement la ville d'Histiée, successivement soumise par Philippe II, Alexandre le Grand et Antigone le Borgne. Antiochos dit le Grand et Mithridate s'en emparent ensuite.

Période romano-byzantine

L'Eubée devient romaine à l'issue des guerres romano-pontiques. Marc Antoine la donne aux Athéniens, puis Auguste la déclare indépendante, et elle le restera jusqu'au règne de Vespasien. Sous l'Empire romain d'Orient (que nous appelons « byzantin »), l'Eubée christianisée eut très tôt un évêque, installé à Chalcis. Il dépendit d'abord du métropolite de Corinthe avant de devenir suffragant d'Athènes. L'île avait aussi un gouverneur civil et militaire qui dépendait du préfet de la Ville de Constantinople. Elle intégra ensuite le cinquième thème d'Europe avec l'Attique, puis le thème de l'Hellade. En 911, Romain Lécapène fut le stratège de l'île.

Au cours de la période byzantine, de nombreuses églises et monastères ont été construits dans l'île, alors prospère comme le montrent les attaques dont elle fut l'objet de la part des Sarrasins, de l'émirat de Crète, des Normands, des Vénitiens et des Croisés. Les attaques des Arabes andalous installés en Crète furent très nombreuses aux ixe et xe siècles. Pendant l’été 1147 la flotte du roi Roger II de Sicile pilla aussi les côtes d’Eubée. Au printemps 1157 une nouvelle attaque victorieuse des Normands sur Eubée oblige l’empereur Manuel Ier à traiter avec le roi Guillaume Ier de Sicile. En 1171 encore, Venise débarqua des troupes commandées par Vital II Michele en Eubée afin d’en pendre le contrôle, mais l'expédition rembarqua en raison d'une épidémie de peste,.

Période franque et vénitienne

Conquête

En 1204, à la suite de la Quatrième croisade, l'île est attribuée à Venise par les vainqueurs (en vertu de la Partitio imperii Romaniae). Cependant au printemps 1205, c'est Boniface de Montferrat, tout nouveau roi de Thessalonique, qui occupe l'île, appelée par les Latins Négrepont, déformation du grec Egripos (variante d'Euripos), un autre nom de Chalcis et de l'île. Il inféode l'île à trois chevaliers originaires de Vérone. Ils sont appelés, ainsi que leurs successeurs, les « seigneurs d'un tiers de Négrepont » ou seigneurs terciers (italien : terzieri). Les premières décennies de domination des seigneurs lombards sont marquées par l'hésitation des tierciers entre l'hommage à Venise (à qui l'île avait été attribuée en 1204) et l'hommage à l'empereur latin de Constantinople héritier des droits de conquête de Boniface de Montferrat. La période latine se traduit par l'expulsion de l'évêque grec orthodoxe de Chalcis au profit d'un évêque catholique.

En 1216, six co-seigneurs « sestiers » (italien : Sestieri) se partagent le pouvoir. Ils reviennent tous dans la suzeraineté exclusive de l'empereur, jusqu'à ce que Baudouin II cède la suzeraineté sur toutes les îles de la mer Égée à Guillaume II de Villehardouin, prince d'Achaïe, probablement en 1248.

En 1255, le règlement de la complexe succession de la sestière Carintana dalle Carceri (sestière du nord de 1220 à 1255), provoque un grave conflit entre le prince d'Achaïe, Guillaume II de Villehardouin, suzerain de Négrepont, et une partie des tierciers. Le , Guglielmo Ier da Verona et Narzotto dalle Carceri (1247-1264), prétendants malheureux à l'héritage de la défunte, répudient l'hommage qu'ils avaient prêté au prince Guillaume et prêtent hommage-lige au doge de Venise, provoquant l'intervention militaire du prince.

Passage sous domination vénitienne

Cette « guerre de succession de Négrepont » se termine en 1259 à la bataille du col du mont Karydi (Mégaride), où le prince bat le duc d'Athènes, Guy de la Roche, allié des seigneurs rebelles. En août 1259, le doge Reniero Zeno négocie la paix avec le prince Guillaume et par le traité du , reconnaît la suzeraineté exclusive du prince sur l'île qui ne fut plus remise en cause.

À la fin du xive siècle, l'achat de la seigneurie de Carystos (1365) puis les morts successives sans héritier de Niccolo III dalle Carceri, duc de Naxos et seigneur du tiers nord (1383), puis de Giorgi III Ghisi, seigneur du tiers central (1390), permettent à Venise d'établir sa domination politique sur la totalité de l'île.

Administration vénitienne

Une inscription datée de 1273 et retrouvée dans les murailles du palais de Chalcis nous apprend qu'en 1273, l'île était gouvernée par un « bayle » et un conseil.

Venise conserve l'institution des tierciers et se contente d'imposer un protectorat en installant de nouveaux seigneurs. Le protectorat se manifeste aussi par la présence de magistrats vénitiens : un provéditeur qui contrôlait toute l'administration et les finances, un podestat chargé de la justice et un capitaine qui commandait les troupes.

Période ottomane

Conquête

Lassé des raids vénitiens dans son Empire depuis leurs bases égéennes, dont l'Eubée, Mehmed II décide de conquérir l'île en 1469. Le siège est mis devant Chalcis qui est systématiquement bombardé par cinquante-cinq gros canons par la terre et bloqué par la flotte ottomane qui contrôle le détroit. La république de Venise envoie alors une flotte de secours en réunissant le plus possible de galères. Les plus rapides arrivent et réussissent à rompre le blocus maritime. Cependant, l'amiral Canale hésite à passer immédiatement à l'attaque des troupes terrestres ottomanes, préférant attendre le reste de la flotte... or Chalcis tombe pendant ce temps.

Le le sultan Mehmed II s'empare de la cité de Négrepont, qui compte alors dans ses murs près de 4 000 habitants. Il massacre la plus grande partie de cette population catholique, réduit en esclavage le reste, et chasse les trois derniers terciers. Canale est désavoué. Il est remplacé par Pietro Mocenigo qui ne peut reprendre l'île. Toutes les tentatives vénitiennes ultérieures échouent.

Administration

Au début, la population grecque accueille favorablement la domination ottomane qui fait cesser les persécutions catholiques et rend l'île aux évêques orthodoxes, mais ultérieurement l'institution de lourdes taxes, de corvées et de nouvelles discriminations la dresse à nouveau contre les occupants : les revenus de l'île appartiennent désormais au Capitan Pacha, représenté sur place par un kiaya et des beys. Agrandie et fortifiée, Chalcis devient la capitale d'un vaste sandjak qui inclut une partie de la Béotie ainsi que l'Attique, la Phocide et la Mégaride. Il semblerait qu'il y ait une division géographique des populations selon leurs origines : Turcs et Juifs dans la ville et Grecs dans les faubourgs. En ville, quatre mosquées sont construites : deux dans la ville et deux dans les faubourgs. Pour les Grecs devenus catholiques à l'époque vénitienne, les jésuites installent une collégiale et une école dans la ville.

Guerre d'indépendance

L'Eubée se souleve dès 1821. Les soldats ottomans se réfugient dans les citadelles de l'île dont celles de Chalcis. Les insurgés grecs se contentent donc d'empêcher toute sortie mais ne se risquent pas à un véritable siège. Des troupes eubéennes sont alors envoyées combattre contre les Turcs sur le continent. En 1822, Ilias Mavromichalis, le fils de Pétrobey, vient mettre le siège devant Carystos. Mais, à la suite d'un assaut poussé trop loin, les assiégeants se trouvent pris par les assiégés et sont exterminés. D'autres Maniotes assiégent Chalcis. L'île est en effet un point clé des lignes de ravitaillement ottomanes.

Source: Wikipedia ()

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Document créé le 03/01/2018, dernière modification le 29/04/2024
Source du document imprimé : https://www.gaudry.be/lieu/g6/g6-eub.html

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Notes

  1.  Nombre de régions : Le nombre contient le nombre total de sous-divisions, qui peuvent étre d'un autre type que région

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